Les entreprises ont à assumer plusieurs obligations envers plusieurs intervenants. Il n’en demeure pas moins qu’à la base de ces obligations se retrouve celle de la garantie de leur travail envers leurs clients.
Les obligations de l’entrepreneur à ce titre varieront selon le type de contrat intervenu avec le client ainsi que du type de déficience ou vice reproché.
La responsabilité de l’entrepreneur variera entre autre selon qu’il s’agisse d’un contrat d’entreprise, de simple fourniture de main-d’œuvre, ou, selon la gravité du vice reproché.
Le Code civil du Québec, crée une présomption de responsabilité de l’entrepreneur, des sous-entrepreneurs, de l’architecte et de l’ingénieur dans l’éventualité où il y a perte de l’ouvrage dans les cinq ans de la fin des travaux. Il est à noter que les termes « perte » et « ouvrage » ont une portée très générale.
Cette responsabilité est très lourde en ce qu’elle impose le fardeau à l’entrepreneur de prouver l’absence de faute et non au client de prouver la présence d’une faute commise par l’entrepreneur.
La notion de perte a une connotation de gravité impliquant jusqu’à un certain point des problèmes de structure ou d’intégrité de « l’ouvrage ». Cette responsabilité n’entre pas en jeu lorsque le dommage est mineur et origine de simples malfaçons. La responsabilité de l’entrepreneur pour malfaçons est alors d’une année (Art. 2120 C.c.Q.). Précisons toutefois que le client pourrait toujours invoquer à l’encontre de l’entrepreneur l’inexécution de ses obligations contractuelles. Il sera intéressant de suivre les développements jurisprudentiels à cet égard puisque sous l’ancien Code civil du Québec (antérieur à 1994) le délai pour poursuivre sur une base contractuelle était de 30 ans, (2242 C.C.B.C.) alors qu’il est réduit à trois ans (2925 C.c.q.) depuis le 1er janvier 1994.
Dans ces circonstances, il est à craindre que le client pourra invoquer son délai contractuel de trois ans pour obtenir compensation pour les malfaçons bien que la garantie légale soit d’une année.
La responsabilité de l’entrepreneur, que ce soit en raison de perte de l’ouvrage ou de malfaçons, existe dans son cadre actuel indépendamment du fait que l’entrepreneur ait conclu un contrat d’entreprise (par exemple selon plans et devis pour un prix forfaitaire) ou un contrat de service (par exemple temps et matériel).
Il est important de souligner que dans certains cas, les tribunaux ont refusé d’imposer ces lourdes obligations légales lorsque les services d’une entreprise sont retenus uniquement comme fournisseur de main-d’œuvre. Ce pourrait être le cas lorsque le propriétaire lui-même choisit, fournit et paie les matériaux. La Cour dans certains cas a décidé que l’entrepreneur n’agissait alors dans les faits que comme simple artisan et non comme entrepreneur au sens civil du terme puisqu’il était rémunéré à l’heure et ne fournissait pas le matériel.
Les notions de « perte » et «d’ouvrage» selon la jurisprudence applicable englobe non seulement les travaux de construction neuve mais aussi les travaux de réparation et d’amélioration.
L’entrepreneur pourra se dégager de sa responsabilité lorsqu’il y a perte de l’ouvrage en démontrant :
- La faute de l’architecte ou de l’ingénieur;
- Qu’il a avisé par écrit en temps opportun l’entrepreneur général et/ou le propriétaire de son désaccord avec la décision d’exécuter les travaux de telle ou telle façon;
- La faute du propriétaire;
- La force majeure (événement imprévisible hors du contrôle de l’entrepreneur).
Dans l’éventualité où on reproche à l’entrepreneur la présence de malfaçons, celui-ci ne pourra se dégager de sa responsabilité qu’en démontrant que :
- Les travaux ont été exécutés selon les normes en vigueur et/ou les règles de l’art et donc qu’il n’y a pas malfaçon;
- La garantie est expirée.
Évidemment rien dans le régime de responsabilité instauré par le nouveau Code Civil du Québec n’empêche l’entrepreneur de poursuivre à son tour l’intervenant qu’il croit responsable des dommages.
Il en sera ainsi par exemple lorsque le maçon se retrouve poursuivi pour un problème d’adhérence alors que le problème réside dans la qualité du béton livré par le fournisseur.
Il est important de préciser que l’entrepreneur qui fournit les biens nécessaires à son travail est tenu envers le client aux même garanties que le vendeur envers ces biens.
Aussi, l’entrepreneur poursuivi pour malfaçon par son client, pourra poursuivre à son tour son fournisseur si les dommages ont pour origine une déficience dans le produit vendu et installé.
Dans ces circonstances, vous comprendrez que l’entrepreneur doit agir rapidement et faire expertiser le plus tôt possible les travaux reprochés avant de se retrouver devant un fait accompli.
Bien qu’il soit de mise d’aviser immédiatement vos assureurs en pareille situation ne présumez jamais qu’ils prendront nécessairement fait et cause pour vous. N’hésitez jamais à engager vos propres experts afin d’identifier clairement la limite de votre responsabilité et celle du fournisseur.
À la lumière de ce qui précède on peut en conclure qu’il n’existe pas de solution magique pour l’entrepreneur afin de se prémunir contre les réclamations.
Par contre, certains conseils peuvent vous aider grandement à prévenir ou minimiser l’impact de réclamations, à savoir :
- Ne signez jamais d’entente contractuelle que vous ne comprenez pas;
- Évitez autant que possible les ententes verbales;
- Tentez de faire signer vos formules contractuelles et, de grâce, insérer des clauses limitant votre responsabilité, surtout dans le domaine de l’entretien;
- Vérifiez toujours la garantie du fournisseur sur les produits que vous vendez et ne donner jamais si possible, une garantie plus grande que celle de votre fournisseur;
- Vérifiez vos polices d’assurances afin de bien comprendre ce qui est couvert;
- N’ignorez jamais un avis de déficience, prenez des photos et faites expertiser dès la première occasion tout en tentant d’obtenir la collaboration de votre fournisseur au besoin;
- Confirmez toujours par écrit votre désaccord préalable lorsque l’on vous impose une façon de faire qui selon vous est contraire aux règles de l’art.
Gouin & Associés
* Ce document est disponible uniquement à des fins informatives et ne constitue pas une opinion juridique.